Théâtre du Capitole
> 26 septembre

Les pêcheurs de perles

Photographies par Mirco Magliocca
C’est la première du premier opéra de la saison. Un enjeu important pour la maison et son directeur: est-ce qu’ils vont aimer? Pari gagné à l’aune des applaudissements et des nombreux rappels pour un public conquis. Opéra composé par Bizet encore jeune, ce qui lui vaut un certain dédain de la part de musicologues qui pistent le défaut, finalement de manière plutôt inappropriée. Bizet a composé un bel opéra, un peu méconnu: on y trouve richesse symphonique et des airs intéressants pour les quatre protagonistes principaux. Le thème de l’opéra semble classique, mais en fait le librettiste et le compositeur lui donne un tour inattendu après une succession de péripéties plus ou moins rocambolesques.
Pour que Krishna ramène à bon port les pêcheurs de perles, on a choisi une jeune femme, qui devra prier nuit et jour, voilée et chaste. Le grand prêtre, Nourabad lui rappelle sa mission. Un thème usuel, qui se termine mal pour l’orante. Or elle a été aimée par deux amis qui y ont renoncé pour ne pas compromettre leur amitié, Nadir et Zurga, devenu roi entre temps. Nadir la retrouve et veut l’enlever, ils sont découverts, condamnés à mort, mais seront sauvés parce que le roi les fait s’échapper en souvenir de l’amitié qui le liait à Nadir et parce qu’il découvre que Leila lui a sauvé la vie autrefois. Il en résulte qu’il mourra du fait des condamnations du prêtre et de la haine de la foule, tandis que les amoureux sont sains et saufs.
Anne-Catherine Gillet est une charmante Leila, peut-être un peu trop éthérée au premier acte. Elle prend ensuite de l’assurance et offre une interprétation fort convaincante de son personnage, de plus en plus émouvant. Zurga, Alexandre Duhamel, a la voix puissante que sert une carrure impressionnante et in donne corps et vie à son personnage, avec une excellente maîtrise de ses airs, complétée par une gestuelle de grande qualité. Jean-Fernand Setti campe un Nourabad impressionnant, doté d’un costume entre la Comedia dell arte et certains Ring traditionnels. Sa voix puissante et chaude lui permet de passer d’un registre à l’autre de manière convaincante: protecteur et bienveillant avec Leila, enragé lorsqu’il décide la mise à mort de Zurga. Reste Nadir incarné par Mathias Vidal. Le jeune ténor sera sans doute parfait dans quelques années. Sa prestation est bonne, mais sa voix doit encore gagner en épaisseur.
Les décors et la mise en scène sont beaux, ainsi que les costumes imaginés par David Belugou. Richesse des couleurs, effets de perspective s’ajoutant à une chorégraphie riche en symboles font du spectacle un excellent moment, encore renforcé par la direction très efficace du chef Victorien Vanoosten.
Un beau début de saison.

Danielle Anex Cabanis
Publié le 09/10/2023 à 20:08.